Mercredi de Pâques 8 avril 2015 — Diocèse de Bourges

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Mercredi de Pâques 8 avril 2015

Ordination presbytérale en l'Abbaye Notre-Dame de Fontgombault, mercredi de Pâques 8 avril 2015
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Lecture : Ac 3, 12-19
Evangile : Jn 21, 1-14

Pour télécharger l'homélie, cliquez ici.

 

Notre célébration d’aujourd’hui nous situe dans ce temps fort qu’est le temps pascal pour tous les chrétiens. C’est l’événement de Pâques qui est évoqué dans cet Evangile qui prolonge l’Evangile de saint Jean, comme une relecture, une synthèse. 

A deux reprises, il nous est dit : « Jésus se manifesta encore aux disciples sur le bord de la mer de Tibériade »

et en conclusion : « C’est la troisième fois que Jésus ressuscité d’entre les morts se manifestait à ses
disciples ».

C’est à partir de cette manifestation ciblée sur les disciples que l’Eglise va s’organiser. Comment expliquer et rendre compte de ce passage du tombeau vide et de la mort dont il est le symbole à la foi au Ressuscité se manifestant aux disciples ?

Le récit n’efface pas, ne masque pas les résistances, les questionnements très humains qui traversent les disciples : les hésitations ne sont pas tues. Voilà donc une partie de pêche qui est vaine et voilà que Jésus est là sans qu’ils le reconnaissent, eux qui l’avaient connu et vu de près dans sa vie terrestre. Apparemment il est le même mais il a changé, le récit ne cherche pas à cacher cette limite chez les disciples comme pour répondre d’avance à ceux qui y verraient un pur produit de leur imaginaire. Jésus est là et on ne le reconnaît pas.

Puis vient la pêche miraculeuse qui, par son aspect extraordinaire, bluffe les professionnels de la pêche qu’étaient les disciples et permet à ce disciple aimé de Jésus de lancer ce cri de reconnaissance qui est en même temps un cri de foi qui change tout ; et Pierre en second change de tenue, signe de la nouveauté qui éclate dans leur vie... La démesure de l’événement, de la pêche, contrairement aux pratiques humaines et même des professionnels, introduit une nouvelle logique, presque de la démesure qui est la marque des interventions divines dans l’histoire des hommes, que nous pouvons constater à plusieurs reprises dans l’Evangile.

Et leur vie, leur regard, en sont transformés en profondeur, durablement, un nouvel avenir s’ouvre.

Puis vient l’épisode qui résonne eucharistiquement dans nos mémoires et nos histoires les plus personnelles. De cette pêche extraordinaire, Jésus invite « Venez manger ». Mais là encore, les disciples sont bousculés, gênés, timides. Aucun n’ose l’interroger, comme s’ils n’étaient pas sûrs, bousculés. Là encore, ils ne paraissent pas
très sûrs d’eux.

Mais peut-être pourrons-nous, avec la lecture des Actes des Apôtres, mesurer l’espace, le parcours et le changement qui ont conduit à cette reconnaissance du Ressuscité depuis la croix, le tombeau vide, au repas partagé au bord du lac avec le Ressuscité. Là encore, le discours de Pierre part d’un fait extraordinaire que l’on ne s’explique pas, qui interroge : la guérison d’un infirme... Pourquoi vous étonner ? dit Pierre, et cette affirmation très importante de Pierre nous rejoint au plus profond de notre expérience pastorale de ministres de l’Eglise : « Comme si c’était par notre puissance ou par notre piété personnelle que nous avons fait marcher cet homme ». Cette phrase de Pierre a un poids très fort et donne sens à une ordination en régime chrétien : c’est toujours « au nom de » et pas en notre nom propre ou à cause de nos qualités personnelles que nous proclamons la Parole de Dieu, que nous la commentons, que nous l’actualisons, que nous la célébrons, que nous donnons les sacrements ou que nous accompagnons spirituellement ceux qui nous font confiance. 

Et Pierre relit cette histoire de Jésus, y compris le chemin de croix, la croix, le tombeau vide : « Le Prince de la Vie que vous aviez fait mourir, Dieu l’a ressuscité des morts, nous en sommes les témoins »....« Convertissez-vous et revenez à Dieu ».

L’histoire prend ainsi un sens nouveau. Et c’est nous, aujourd’hui, qui avons à écrire et inscrire cette histoire dans le présent.

Le point de départ de cette ouverture à la foi au Ressuscité ne peut-il pas être l’épreuve de la maladie, du désespoir et d’une guérison, signe de l’action du Seigneur ressuscité ? L’échec de la pêche est le point de départ d’une pêche miraculeuse, appel à une conversion devant son caractère extraordinaire. N’y a-t-il pas aujourd’hui comme hier des événements déclencheurs ? J’aurais tendance à le croire en pensant aux trentehuit adultes de notre diocèse aux histoires très différentes qui ont reçu les sacrements de l’initiation à Pâques.

En cette année de la vie consacrée, nous sommes invités à témoigner de la joie de l’Evangile, à être des disciples missionnaires, à être des témoins fidèles. Notre pape invite notre Eglise tout entière à sortir, à rejoindre les périphéries : un monastère ne peut-il pas être à sa manière pour certains de nos contemporains une périphérie qui permettra un accueil, une issue pour des vies qui cherchent sens, comme un recours ?

L’ordination prend tout son sens dans cette dynamique pascale. Le prêtre pasteur ne peut témoigner que de ce qu’il vit d’abord pour lui-même. Il est d’abord un baptisé, dans la mort et la résurrection du Seigneur. Sa responsabilité est très lourde : témoigner et surtout transmettre, nourrir, former le peuple des baptisés : on n’est jamais complètement à la hauteur, on reste pécheur, mais il y a une source de grande liberté intérieure, de paix, de joie, c’est que nous ne sommes que des serviteurs ; le maître de la moisson, c’est le Seigneur lui-même.

+ Armand MAILLARD
Archevêque de Bourges